Lors des nuits de la lecture, j'apprenais tout à fait par hasard qu'au Texas et en Floride, plus de 400 livres avaient été retirés d'établissements scolaires et de bibliothèques publiques. Censurés oui parce que prétendue controverse.
Dans un même temps, le Conseil d’État français décidait d'interdire la vente de livres sur les marchés. Ça plus un contexte sanitaire, économique et social compliqué, il n'en fallait pas plus pour me mettre en colère.
Aussi, modestement j'ai décidé de me faire un challenge des livres censurés. Et, de promouvoir plus largement la lecture, les livres. Ainsi, à partir du site Banned § challenged books notant les livres très souvent mis à mal, j'ai créé mon challenge des livres bannis.
Vous verrez sur ce site les raisons de cette censure toutes plus honteuses les unes que les autres. Pour vous donner un exemple, la saga Harry Potter comme celle A La croisée des mondes sont souvent accusées de satanisme. Pour ma part, j'ai jeté mon dévolu sur deux romans : Georges et Le premier qui pleure a perdu.
George semble vivre heureux, entouré de sa famille et de ses amis. Mais le petit garçon sait que ses proches ignorent qui il est vraiment car il est persuadé, au fond de lui, d'être une fille. Un spectacle de théâtre lui donne l'opportunité de s'affirmer.
J'avoue que j'ai été un peu déçue par ce roman. Je m'attendais à plus d'émotions, d'empathie. Au final, j'ai eu l'impression d'être tenue à distance. Le choix d'un narrateur extérieur n'aide pas non plus.
Ceci étant, le sujet est fort : la transsexualité, l'identité sexuelle. Autant de sujets qui peuvent heurter l'Amérique puritaine. De quoi aussi, montrer que ce n'est pas les parents qui influencent l'orientation sexuelle de leurs enfants.
A travers deux scènes fortes, celles aux toilettes et dans le bain, l'auteur montre la difficulté d'être né dans le mauvais corps. Ce n'est ni un caprice ni une lubie. C'est se sentir étranger à ce propre corps qui est pourtant le nôtre. En être le prisonnier. Prisonnier toujours de ce que le miroir et les autres nous renvoient.
Alors qu'à l'intérieur, on est autre. On est soi. En lisant ce livre, j'ai pensé au film Freaky Friday. Et, je me suis dis que pour comprendre l'autre et ce dans toute situation, ça serait pas mal de pouvoir se glisser dans sa peau. Parce qu'il y a souvent un décalage entre ce qu'on perçoit de l'autre et ce qu'il est vraiment. D'où cette dédicace pleine de sens : "A toi qui t'es senti(e) différent(e)".
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Junior est un jeune indien Spokane. Il se fait souvent tabasser comme tous les gogols de la réserve. Il est né tout cassé, tout tordu, il accumule des handicaps : myope, maigre et premier de la classe. En vrai, il est drôle et assez lucide pour savoir qu'il n'aura aucun avenir en restant avec les siens. Il décide alors d'aller à l'école des blancs, voir ailleurs s'il y est. Admis au prestigieux lycée de Reardan, junior quitte la réserve en éternel optimiste comme il est né.
Coup de cœur pour moi au point de le partager avec mon père qui l'a adoré également. Je compte l'acheter pour le relire ; et, noter des passages. A l'origine, il a été censuré parce qu'il parle de masturbation. Oh mon dieu, gravissime d'autant que c'est mentionné trois fois tout au plus. Et, de manière totalement naturelle et rigolote.
En fait, la vraie raison et vous vous en doutez sûrement, c'est que ça brosse un portrait très réaliste de l'Amérique et de tous ses travers. De l'homme blanc qui a tout pris aux Indiens : leur terre, leur culture, leur religion, leur dignité.
Grâce à la plume magique de l'auteur, on voit le poids de l'histoire. Ses conséquences encore plus aujourd'hui. Alcool, drogue, chômage, pauvreté. Plus vraiment Indien mais pas vraiment américain non plus. Une identité mise à mal et qui semble traverser les générations.
Sauf qu'au milieu de tout ça, y a Junior qui sous l'impulsion de son professeur, voit peut-être la lumière au bout du tunnel. Mais, un indien ne quitte pas les siens pour aller chez les blancs. Surtout quand son meilleur ami voit rouge. Surtout quand l'école est à plusieurs kilomètres de chez vous. Surtout quand on mène la vie dure d'un côté comme de l'autre.
C'est drôle, touchant et terriblement optimiste malgré des passages très durs. Ce livre pourrait se résumer à ce passage : "Avant, je croyais que le monde se divisait en tribus. En noir et blanc, en indien et blanc. Mais je sais à présent que ce n'est pas vrai. Le monde n'est divisé qu'en deux tribus : ceux qui sont des enfoirés et ceux qui n'en sont pas".
C'est aussi la force de ce récit, montrer que les préjugés sont tenaces de chaque côté. Mais que parfois par le biais d'une main tendue, on peut voir l'autre dans sa vulnérabilité, dans son entièreté.
A force de courage, de ténacité, Junior va écrire sa propre histoire au delà des limites qui lui sont imposées. Et, montrer que tout est presque possible. Que rien n'est écrit à l'avance. Qu'un homme, ça pleure mais que rien n'est perdu.
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